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25 juin 2003
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CAA Lyon, 5 décembre 2002, Commune de Montélimar

Retour au sommaire du fascicule n°9

 

« Considérant qu’aux termes de l’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : « le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune » ; qu’aux termes de l’article L. 2122-21 du même code : « Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l’Etat dans le département, le maire est chargé, d’une manière générale, d’exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : […] 6° De souscrire les marchés » ; que ces dispositions, à la différence de celles de l’article L. 2122-22 du même code qui autorisent le conseil municipal à déléguer au maire certaines de ses compétences, ont seulement pour objet d’habiliter le maire à prendre les mesures qu’appellent les délibérations adoptées par le conseil municipal ; qu’à cet effet, les décisions prises par ce dernier doivent être suffisamment précises quant à leur finalité, leur portée et leur contenu pour ne pas conduire le maire à empiéter sur les compétences de l’organe délibérant que ce dernier ne lui a pas déléguées ; qu’ainsi, lorsque le conseil municipal autorise le maire à souscrire un marché au nom de la commune, sa délibération doit approuver l’acte d’engagement tel qu’il sera signé, lequel mentionne, notamment, l’identité des parties contractantes et le montant des prestations ; »

Note : Par une seule délibération du 7 février 2000, le conseil municipal de Montélimar a approuvé la réhabilitation d’un réservoir d’eau potable, autorisé le maire à engager une procédure de marché de maîtrise d’œuvre et, enfin, à le signer. La Cour administrative d’appel de Lyon sanctionne cette pratique, pourtant courante au sein des collectivités locales, consistant pour les assemblées délibérantes à ne se réunir qu’une seule fois pour un même marché, le plus souvent en amont, comme en l’espèce.

D’après l’article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, la compétence pour souscrire un marché est partagée entre le conseil municipal et le maire. En tant qu’exécutif local, le maire est seul compétent pour signer (le texte dit « souscrire ») le marché sous réserve d’une délibération préalable du conseil municipal l’y autorisant.

L’enjeu est de savoir à quel moment de la procédure cette délibération doit intervenir.

En 1997, le Conseil d’Etat affirmait « que si le maire ne peut contracter au nom de la commune sans y avoir été autorisé par une délibération expresse du conseil municipal, aucune disposition législative ou réglementaire […] n'impose au maire d'obtenir une telle délibération pour lancer et mener à terme une procédure par appel d'offres ouvert ». (CE, 4 avril 1997, Préfet du Puy-de-Dôme c/ commune d’Orcet, Rec. p. 132). Cela voulait dire que le Maire peut lancer une procédure (Publication, mise en concurrence, réunion de CAO) sans autorisation du conseil. Une seule délibération suffit donc, pourvu qu’elle intervienne avant la signature du contrat.

Ainsi l’article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales n’implique une telle délibération que pour la souscription aux marchés, c’est-à-dire pour leur signature et non pour lancer une procédure. Cependant, en cas de désaccord du conseil municipal, cet organe peut refuser d’octroyer l’autorisation à l’exécutif local de signer le marché, malgré plusieurs mois de procédure menée par le maire. En outre, les élus, et notamment ceux de l’opposition, pourraient arguer de la désinformation en la matière, car, officiellement, le conseil municipal n’a pas connaissance de l’existence de la passation des marchés.

Pour que les élus soient informés dès départ, on autorisait donc le lancement de la procédure, tout en autorisant en même temps la signature, lorsque le titulaire serait choisi. Il ne restait plus qu’à connaître la position du juge face à cette pratique. Sa réponse n’a pas manqué de susciter la polémique. En effet, la Cour estime que la délibération du conseil municipal de Montélimar, préalable au commencement de la procédure, autorisant le maire plusieurs mois à l’avance à signer le marché avec le futur candidat retenu, est illégale.

La validité de la délibération a pour condition sine qua non que les conseillers municipaux délibèrent à la connaissance d’un minimum d’informations sur le marché. Il ne s’agit pas en effet de délibérer les yeux bandés. Comme l’a jugé précédemment le Conseil d’Etat, les membres du conseil municipal « doivent pouvoir consulter les pièces et documents nécessaires à leur information sur l’affaire faisant l’objet de cette délibération » (CE Sect., 23 avril 1997, Ville de Caen, req. n°151852). Or, lors de la délibération du conseil municipal de Montélimar, la consultation des pièces concernées ne pouvait avoir lieu car inexistantes ! Le droit de tout conseiller municipal d’être informé des affaires de la commune faisant l’objet d’une délibération (article L. 2121-13 du CGCT) n’était pas respecté. C’est pourquoi la Cour administrative d’appel de Lyon exige que la délibération autorisant le maire à signer n’intervienne pas avant que l’acte d’engagement, pièce essentielle du marché, ne soit lui-même signé par le soumissionnaire.

Cette décision du juge administratif n’exclut pas pour autant une délibération en amont en l’absence des informations nécessaires, mais elle n’a qu’un caractère superfétatoire, malgré son utilité ! Dans un tel cas, il convient alors, que le conseil municipal délibère une seconde fois, en fin de procédure, pour valablement autoriser le maire à signer le marché. Les conseils généraux et régionaux sont tout autant concernés par cette exigence.

Cette décision réveille et amplifie un malaise patent relatif à la lourdeur des procédures. Plusieurs mois sont en effet nécessaires pour conclure un marché public. Mais peut-on faire un tel reproche au juge, celui d’être en décalage avec la réalité ? Serait-il raisonnable d’espérer du juge administratif de rendre des arrêts de règlement, plus pragmatiques? On l’accuserait alors de créer le droit au lieu de l’appliquer.

Peut-être le pouvoir réglementaire, voire le pouvoir législatif, se saisira de l’affaire et ôtera la crainte des collectivités locales de devoir prendre deux délibérations par marché. A moins que le Conseil d’Etat ne désavoue la Cour administrative d’appel de Lyon.

Yoan THOURY

La petite remarque du Prof.

Un petit point sur les délibérations nécessaires au lancement et à la passation dans les collectivités territoriales et les EPCI.

Dans les communes, et par conséquent tous les établissements publics de coopération intercommunale, une seule délibération est nécessaire pour les marchés publics, en fin de procédure, pour permettre à l’assemblée délibérante d’approuver le choix du titulaire fait par la CAO et d’autoriser la signature. On notera que cette délibération opère le choix du titulaire pour les maîtrises d’œuvre (la CAO ne rend qu’un avis – art. 74 du CMP). Bien sûr, il peut y avoir une délibération en début de procédure pour autoriser l’exécutif à la lancer.

On notera cependant que, pour les « marchés de travaux, de fournitures et de services qui peuvent être passés sans formalités préalables en raison de leur montant », l’exécutif peut recevoir une délégation pour la « passation ». Ainsi, uniquement pour des marchés publics ne dépassant pas (actuellement), le seuil de 90.000 euros HT, l’exécutif qui a cette délégation peut se dispenser de toute délibération (art. L 2122-22), à condition que la dépense soit inscrite au budget. Il faudra rendre compte de la passation au conseil le plus proche (art. L 2122-23).

Pour ce qui est des départements et régions, les règles sont un peu différentes.

L’assemblée délibérante peut donner à l’exécutif la délégation de passer seul les marchés de moins de 90.000 euros HT (L 3221 11 pour le département et L pour la région). Cette délégation doit venir de l’assemblée et non de la commission permanente.

En dehors de ce cas, l’article définissant les pouvoirs du Président (art. L 3221-1 / L 4231 1 ) ne lui permet pas de lancer les procédures seul (L’arrêt Commune d’Orcet ne vaut pas pour lui). Tout lancement doit donc être autorisé en principe par l’assemblée délibérante sur la base de la clause générale de compétence (L 3211-1 / L 4221 1). De même c’est l’assemblée qui autorisera la signature par une deuxième délibération.

A titre d’assouplissement, les délibérations nécessaires peuvent être prises par la Commission permanente, sous réserve que ce droit lui ait été expressément délégué par l’assemblée délibérante (L 3211-2 / L 4221 5)

En ce qui concerne les délégations en revanche, et pour toutes les collectivités, il faut toujours une délibération se prononçant sur le principe de la délégation, et autorisant le lancement de la procédure (art. L 1411-4 du CGCT) et une délibération pour choisir le titulaire (art. L 1411 7). L’exécutif ne peut pas ouvrir la procédure seul. Ajoutons qu’une délibération est également nécessaire pour fixer le règlement déterminant les conditions de dépôt des listes en vue de l’élection de la commission d’ouverture des plis, laquelle est différente de la CAO (D 1411 5).

Fabrice GARTNER
Directeur du DESS

 

 

 
 

 

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